vendredi 25 novembre 2011

Discours de M. Sarkozy sur le nucléaire : affirmations gratuites et arguments éculés

La question de l'énergie mérite mieux que les arguments éculés du retour au Moyen-âge et à la bougie

Le discours de M. Sarkozy sur le nucléaire, prononcé ce vendredi depuis le site du Tricastin (Drôme), a été un festival d'affirmations gratuites, de lieux communs et de contradictions.

Ainsi, évoquant l'hypothèse que la France sorte du nucléaire, M Sarkozy a demandé "Devrions nous être le seul pays qui tourne le dos au progrès ?", oubliant que la France est cernée par des pays qui ont rejeté l'atome ou décidé d'en sortir (soit de façon volontariste, soit en ne renouvelant pas les centrales arrivant en fin de vie) : Belgique, Luxembourg, Allemagne, Suisse, Italie et Espagne.

M. Sarkozy a d'ailleurs donné l'Allemagne en exemple par rapport aux 35h, alors pourquoi ne pas suivre aussi son exemple à propos du nucléaire ? C'est arbitraire et contradictoire.

De la même façon, M. Sarkozy a prétendu que la sortie du nucléaire nuirait à la compétitivité économique de la France alors que l'Allemagne, où l'électricité serait d'après M Sarkozy bien plus chère qu'en France, est pourtant beaucoup plus compétitive. Nouvelle contradiction majeure.

Par ailleurs, M Sarkozy a évoqué un supposé "consensus" en faveur du nucléaire dans la société française, oubliant que la construction des centrales a été contestée par des manifestations massives, lesquelles ont été réprimées à grand renfort de compagnies de CRS et de gaz lacrymogènes. Il s'agit là d'un bien curieux "consensus".

D'autre part, alors que la question de l'énergie est des plus sérieuse, M Sarkozy s'est abaissé à utiliser les arguments les plus éculés, parlant de moyen-âge et évoquant le fameux et ridicule "retour à la bougie". A nouveau, qui peut croire que Belgique, Allemagne, Suisse, Italie et Espagne s'éclairent à la bougie ? Mieux : M Sarkozy semble ignorer que ce sont ces pays qui, chaque hiver, exportent massivement de l'électricité vers la France qui s'est elle-même piégée dans l'impasse de l'option "centrales nucléaires  + chauffage électrique".

Qui plus est, M Sarkozy a prétendu que le nucléaire donnait à la France son indépendance énergétique alors que "la facture énergétique de la France s’élève à 46,2 milliards d’euros en 2010, en hausse de 20 % en un an. Elle représente ainsi 2,4 % du PIB en 2010 contre 1 % pendant les années 1990. Elle continue à représenter à elle seule l’équivalent du déficit du commerce extérieur, qui est en 2010 d’un peu plus de 45 milliards d’euros." (Chiffres officiels, cf http://www.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/Ref_energie_2010.pdf )

Sans surprise, M Sarkozy a aussi tenté d'accréditer l'idée selon laquelle le nucléaire serait un important pourvoyeur d'emplois. Là aussi, il ferait bien de regarder vers l'Allemagne où, par exemple, le grand syndicat IG Metall, longtemps pronucléaire, a totalement changé de position justement au nom de l'emploi (cf http://bit.ly/rtBVNT ).

Il faut par contre signaler que M Sarkozy a fait UNE remarque de bon sens par rapport au projet de M Hollande de fermer 24 réacteurs nucléaires : "Si le nucléaire est vraiment si dangereux, ce ne sont pas 24 mais les 58 réacteurs nucléaires français qu'il faut fermer". On ne saurait mieux dire.